5 questions à… Philippe Richert
Entretien avec le Président UMP de la Région Alsace, nommé en novembre dernier Ministre en charge des Collectivités territoriales, autour de la réforme des Collectivités et de certains enjeux régionaux importants.
La Loi du 16 décembre 2010 relative à la réforme des Collectivités territoriales remplace les communautés urbaines de plus de 500 000 habitants par des métropoles. Pourquoi ?
La création des métropoles fait partie de l’arsenal de diversification des collectivités territoriales. On garde les communes, mais si vous regardez les intercommunalités, vous en avez de 5 000 ou 10 000 habitants qui ne peuvent assumer les mêmes responsabilités que celles comptant 200 ou 500 000 habitants. Nous souhaitons transférer, à celles qui ont les moyens de les assumer, des responsabilités plus importantes pour être plus efficaces que les Départements et Régions. Donc c’est donner à nos grandes métropoles l’occasion d’être les égales de celles d’autres pays. Au début, l’idée était de leur transférer toutes les compétences que les Conseils régionaux et généraux ont sur le territoire métropolitain. Nous sommes revenus là-dessus notamment parce qu’un certain nombre de maires s’y opposaient de manière farouche. La première étape est de permettre le transfert d’un certain nombre de compétences du Département, de la Région ou de l’État à ces structures. On verra ensuite comment aller plus loin. Cette première étape permettra aussi à Strasbourg de faire partie du club très fermé des métropoles, même si elle n’atteint pas les 500 000 habitants.
Votre prédécesseur, Adrien Zeller, était hostile à la fusion entre Bas-Rhin et Haut-Rhin rendue possible par la Loi. En 2008, il affirmait[1. Libération du 1er décembre 2008] : « Je ne veux pas jeter l’acquis régional pour créer un mouton à cinq pattes. » Pourquoi y êtes-vous favorable ?
Aujourd’hui, les gens ont du mal à comprendre comment fonctionne la démocratie. Quand vous leur demandez à quoi sert la Région, ils ne savent souvent pas répondre. L’idée est de simplifier les niveaux d’activité. La Loi permet de fusionner deux ou plusieurs Départements entre eux, deux ou plusieurs Régions ou encore le tout en une seule collectivité. En réalité, ce n’est pas de faire disparaître le département en tant que territoire qui est important, mais d’avoir la possibilité d’un seul niveau de collectivité au lieu de deux. La conséquence sera de voir demain un unique Conseiller territorial siéger à la fois au Conseil général et régional. Cela permettra d’être plus efficace, plus lisible pour les citoyens et d’économiser des moyens financiers et du personnel.
Être à la fois Ministre et Président de la Région Alsace, est-ce conciliable ? Le député apparenté PS René Dosière parle en outre de conflit d’intérêts en arguant que vous êtes un ministre chargé de « rendre des arbitrages concernant l’ensemble des territoires tout en étant le président de l’un d’eux, la Région Alsace »[2. Cumul des mandats : “Un ministre peut recevoir jusqu’à 21 000 euros”, dans Le Monde du 20 décembre 2010, signé Éric Nunès]. Que lui répondez-vous ?
Très clairement, cela voudrait dire qu’il n’y a plus aucun autre mandat qui soit possible. Lorsque vous êtes parlementaire et élu communal, vous pourriez favoriser votre commune. Mais ces deux niveaux de responsabilités permettent de mieux comprendre ce qui se passe sur le terrain et d’en être le relais. Le député qui a dit cela prône le non-cumul mais il continue d’être enseignant à l’Université, d’être payé pour et ça ne lui pose aucun problème. Lorsque je me suis présenté au Conseil régional, j’ai dit que si j’étais élu, je quitterai le Sénat. Je l’ai fait, et l’aurais fait, quoi qu’il arrive. Aujourd’hui, on me propose une responsabilité au gouvernement : je pense que l’Alsace mérite d’être représentée à Paris. Tous les messages que j’ai reçus, par milliers, le confirment.
La Marque Alsace est une des priorités de la Région…
Ce n’est pas un nouveau sigle. Aujourd’hui, quand vous parlez de l’Alsace, chacun en a sa représentation : le duo “cigogne-kougelhof”, la région porteuse en matière d’innovation industrielle, etc. Nous souhaitons la mise en place d’une image qui puisse être portée par tous, pour que les efforts faits entre collectivités, industriels, associations, universitaires, élus… reviennent à l’Alsace. Il faut faire un travail de décantation : qu’est-ce qui identifie l’Alsace par rapport à d’autres régions ? Plus que mutualiser, c’est donner la possibilité d’avoir un effet de levier plus important, un travail sur l’identité, sur le rassemblement pour, demain, être plus fort.
Vous avez réagi à l’urgence d’un soutien à la numérisation des salles de cinéma alsaciennes en débloquant 300 000 euros[3. Lire notre dossier sur la numérisation des cinémas]. Quels sont les principaux axes de votre politique culturelle pour 2011 ?
La Région a peu de compétences, du fait de la Loi, dans le domaine culturel. Nous assumons les responsabilités que nous avons, notamment le service de l’inventaire, mais à côté de celles-ci nous souhaitons être présents sur quelques créneaux pour être partenaires de la création et de la diffusion culturelle, en essayant d’avoir une cohérence avec l’action des communes et des intercommunalités. Il me semblait que la diffusion et la numérisation au niveau des salles de cinéma étaient des moyens de répondre à un besoin clairement exprimé.